Co-emprunteurs, comment apprécier le risque d’un endettement excessif ?
En cas d’endettement excessif, la responsabilité civile de la banque peut être recherchée par les emprunteurs.
Privilégiant l’intérêt du banquier sur celui du client, la Cour de Cassation vient de juger que l’existence d’un risque d’endettement excessif doit s’apprécier au regard des capacités financières globales des co-emprunteurs. (Cass. com. 4 mai 2017, n°16-12.316).
Dans cette affaire, la question se posait de savoir si en présence de co-emprunteurs de qualité différente (profane et avertie), l’analyse du risque d’endettement excessif devait se faire par une approche globale ou individuelle.
Au moment de la conclusion d’un prêt, le banquier doit vérifier les capacités financières de l’emprunteur ainsi que les risques d’endettement, nés de l’octroi du prêt. Il doit pour cela comparer la charge du prêt avec la capacité financière et la capacité d’endettement de l’emprunteur.
En présence d’un emprunteur profane, le banquier est tenu, en outre, par une obligation de mise en garde de l’emprunteur sur le risque d’un endettement excessif, ce qui n’est pas le cas d’un emprunteur professionnel.
La qualité d’emprunteur profane ou averti s’apprécie au cas par cas, en tenant compte de la catégorie socioprofessionnelle de l’emprunteur ainsi que de l’habitude qu’il a ou non de souscrire le même type de crédit.
Lorsque deux personnes empruntent, cette qualité doit s’apprécier individuellement. (Cass. 1re civ., 30 avr. 2009 : JCP E 2009).
Dans l’arrêt du 4 mai 2017, la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Val-de-France a consenti à deux époux des prêts destinés à financer la création d’une entreprise artisanale de menuiserie.
Par suite, l’entreprise a été placée en liquidation judiciaire et la banque a assigné l’épouse en paiement.
En défense, celle-ci a invoqué la responsabilité du banquier pour manquement à son devoir de mise en garde au moment de la souscription du prêt, car la somme à rembourser représentait plus de la moitié de son revenu mensuel. Elle estimait par conséquent que la charge du prêt était excessive.
Cette argumentation n’a pas été suivie par la haute juridiction, qui a retenu qu’en tout état de cause, il convient de prendre en compte l’ensemble des biens et revenus des co-emprunteurs.
Il résulte de cette approche globale, qu’un co-emprunteur ayant une faible capacité d’endettement peut se voir privé de la mise en garde du banquier sur le risque d’endettement excessif, alors même qu’il devra par la suite supporter la charge de l’ensemble de la dette, au même titre que le co-emprunteur disposant d’une plus forte capacité d’endettement.
Cette situation est loin d’être anecdotique, notamment à la suite d’un divorce.